Par plaisir-de-mots.over-blog.fr
Ce printemps là.
Ce printemps là, j'ai eu les oreilles cassées par le chant de la mésange que ne couvrait plus la rumeur de la ville.
Ce printemps là, j'ai pu sentir le doux parfum du muguet grâce à la bombe de désodorisant de mes toilettes.
Ce printemps là, j'ai su que j'avais des voisins invisibles mais qui savaient applaudir.
Ce printemps là, j'ai su que le PQ était plus important que la télé.
Ce printemps là, j'ai su que la télé pouvait, juste si elle le voulait, être intelligente.
Ce printemps là, j'ai découvert qu'on pouvait laver une salade au savon de Marseille mais qu'elle supportait mal d'être tordue pour l'essorage.
Ce printemps là, j'ai vu plus de fleurs que l'an passé en me baladant : mais c'était une balade sur internet
Ce printemps là, j'ai su aussi que la télé spectacle de la majorité des chaines d'info en continu, continuerait à alimenter la pulsion scopique morbide de monsieur Tout le monde.
Ce printemps là, j'ai appris que des chats avaient fait des comas éthyliques parce que leurs maitres avaient moins de cerveau qu'eux.
Ce printemps là, j'ai bu plus d'apéros que je n'ai serré de mains.
Ce printemps là, j'ai failli traverser la France, pour aller aider les maraichers à cueillir des fraises car la continuité pédagogique nous avait laissé un temps libre incroyable.
Ce printemps là, j'ai grandement contribué à la lutte contre le réchauffement climatique en n'utilisant quasiment plus ma voiture.
Ce printemps là, j'ai quand même aggravé la montée dangereuse de la température du globe en faisant chauffer les serveurs pour le télétravail.
Ce printemps là, je me suis dit qu'avec l'injonction de porter des masques, les enfants penseraient que c'était carnaval tous les jours. J'ai eu une pensée pour tous ces parents qui se sont vus réclamer quotidiennement des beignets pendant la totalité du confinement.
Ce printemps là, je me suis demandé, comment, pour organiser le bac 2020, le ministre de l'éducation avait fait pour s'arracher les cheveux.
Ce printemps là, j'ai grondé moins d'élèves, beaucoup moins.
Ce printemps là, je suis allé cueillir des ornithogales, les asperges de bois... dans mon congélateur.
Ce printemps là, j'ai reçu peu de petits sourires du matin accompagnés d'un "Bonjour Maître Patrick"
Ce printemps là, j'ai réalisé que j'avais un appartement grand comme un palace, en pensant à tous ceux qui, au même moment, devaient tenir à plusieurs dans des tout petits logements.
Ce printemps là, je me suis obligé à m'habiller tous les matins, pour aller au télétravail, afin de ne pas choquer les enfants et surtout afin éviter un procès pour attentat à la pudeur.
Ce printemps là, j'ai bu plus de café que de raison.
Ce printemps là, j'ai parfois été ému aux larmes par tout ce qui advenait, dans le meilleur comme dans le pire.
Ce printemps là, j'ai vu que le mot Solidarité n'était pas vide de sens.
Ce printemps là, j'ai compris que le virus de la connerie ne serait jamais éradiqué... jamais.
Ce printemps là, j'ai plus usé mes chaussons que mes chaussures.
Ce printemps là, j'ai su que des tas de femmes, des tas d'hommes pouvaient prétendre au titre de Juste, modulé par l'actualité macabre. Justes parmi les Nations qui ont risqué leur vie pour sauver des Juifs, et des tas d'autres gens de toutes confessions ou sans confession, en tout désintéressement.
Ce printemps là, si terrible fut elle, je me suis dit que la bombe atomique avait des soucis à se faire car elle risquait d'être détrônée de la première place des saloperies létales par le Covid19.
Ce printemps là, j'ai constaté qu'il n'était pas facile de trinquer en cognant les verres les uns contre les autres par téléphone.
Ce printemps là, je me suis dit que les grands, ceux qui nous gouvernent, devaient se demander comment seraient considérées leurs décisions, non pas dans le monde nouveau, mais dans le monde d'après.
Ce printemps là, je me suis dit que c'était une foutue époque pour accueillir ma future petite fille.
Ce printemps là, je me suis dit que l'Homme, trop arrogant finalement, était petit... vraiment tout petit.
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