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  • : Mon objectif est d'explorer l'inconnu d'une vie nouvelle, grâce, entre autres, à l'écriture. Le ton restera le même; souvent impertinent, parfois cynique mais toujours en tentant de garder ce qui nous permet encore de vivre dans ce drôle de monde, l'humour, dans tous ses états.
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30 novembre 2011 3 30 /11 /novembre /2011 19:28

Une réelle amitié m'avait lié à lui depuis mon arrivée, en 72. De fait, il n'avait eu de cesse, après notre rencontre, que de m'apporter aide et soutien.


Cette relation, d'abord emprunte d'une certaine distance de ma part, passa fort rapidement de connaissance à copinage et de copinage à amitié. Tant et si bien que quelques semaines après notre première discussion, nous prîmes le pli de nous retrouver régulièrement. Les bars, pubs et autres lieux où coulent bière, whisky et autres liquides qui catalysent la convivialité devinrent nos QG du soir.
"Nous ne sommes pas pays, se plaisait-il à répéter à l'envi lors de nos veillées interminables, mais nous venons du même continent, toi et moi" Forcément, au bout du monde, la géographie natale rapproche.
"Je suis ici depuis longtemps ; maintenant je connais tout de ce pays, ajoutait-il"
Après ses études, il avait dû quitter son pays d'origine pour des raisons restées assez obscures. Il m'avait dit souhaiter oublier cette vie antérieure. Trop pleine de douleur sans doute. Il avait travaillé dur pour s'intégrer dans ce pays et avait finalement fini par trouver un job sérieux et durable. Il semblait heureux et voulait en faire profiter ceux qui comme lui, débarquait dans l'inconnu.

Pourtant, malgré cela, malgré le lien qui nous unissait, malgré la fréquence de nos rencontres, de nos évasions communes dans les limbes de l'esprit de vin, je ne tardai pas à ressentir une sorte de gêne à son contact. Je mis un temps non négligeable à réaliser ce qui m'avait conduit à une telle perception des choses. Nos rencontres perduraient mais un événement avait jeté le trouble dans mon esprit. Plus exactement une conversation ou plutôt non, une simple phrase... qui m'avait conduit à le regarder, autant qu'à l'écouter.

J'avoue que je n'avais jamais particulièrement prêté attention à son aspect extérieur tant ses propos étaient toujours brillants et captivants. Il ne paraissait pas athlétique mais les proportions de son corps, maintenant que son image me revenait, tendaient à la perfection. Son visage répondait également à une forme canonique, traits fins mais d'une ferme masculinité, yeux bleu cristal, cheveux blonds courts lissés, denture parfaite.

Ce fût certainement cela. Le choc entre ces mots, pourtant si simples, et ce corps sans tare.
Une phrase... une phrase en réponse à ma plainte.
"J'ai mal aux dents" m'étais-je plaint alors qu'il m'avait salué d'un "comment vas-tu mon ami ?"
A ma réponse, il avait souri, mais d'une façon inhabituelle, plus dure qu'à l'accoutumée.
"Je connais quelqu'un qui pourrait t'arranger ça" avait-il poursuivi sans ce départir de ce sourire je finis par trouver plus que glacial... Le ton de sa voix avait changé mais je ne compris qu'à sa seconde réplique de quoi il s'agissait.
"Un dentiste de tes connaissances ?" questionnais-je, encore crédule.
"Peut-être... " avait-il lancé avec une prononciation teintée d'un accent que je ne lui avais jamais entendu auparavant.
Je trouvai la réponse définitive à mon malaise quelques secondes après.
Dans un crissement de pneus, une voiture fonça sur lui et le heurta dans un bruit sourd avant qu'il ne put poursuivre sa phrase.

Il gisait au sol, inanimé. Le sang coulait de son oreille droite. Le véhicule venait de tourner prestement au coin de la rue. Tétanisé, j'avais été le témoin d'un assassinat. Je me penchai rapidement sur le corps désarticulé, pour constater que la vie l'avait quitté sous l'effet du violent choc. Au milieu des affaires dispersées de sa sacoche, une roulette chirurgicale dépassait d'une enveloppe à entête du ministère de l'intérieur du Chili sur laquelle je pus lire "à l'attention d'Helmut" 

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