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  • : Mon objectif est d'explorer l'inconnu d'une vie nouvelle, grâce, entre autres, à l'écriture. Le ton restera le même; souvent impertinent, parfois cynique mais toujours en tentant de garder ce qui nous permet encore de vivre dans ce drôle de monde, l'humour, dans tous ses états.
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28 janvier 2017 6 28 /01 /janvier /2017 16:14

C'était réellement étrange, ce minuscule filet de lumière. Aussi ténu qu'un cheveu, il se dessinait là, sous mes yeux, à la surface de l'eau. Pour être plus précis, il faisait exactement frontière entre l'eau et la porcelaine qui servait de réceptacle. Incongruité absolue, ce mince rai lumineux avait trouvé sa place, oui, dans la cuvette de mes toilettes !?!

Folie ? Non... la ligne existait bel et bien, séparant le liquide du solide. Pourquoi là, dans cet endroit ? Je n'en avais pas la moindre idée, mais je devais me résoudre à l'évidence, il était là, sous mes yeux.

Mes toilettes avaient fait l'objet d'un ménage parfait, Laura étant une reine du nettoyage. Rien ne maculait la cuvette, l'eau de Javel avait combattu les miasmes, contré les marques. Alors ? Qu'était-ce donc que ce fil d'où jaillissait une radiation, faible certes, mais suffisante pour être remarquée ? Cela n'éclairait pas, cela était, immanent.

Je l'observai fixement, avec la montée insidieuse d'un sentiment étrange. Pas de peur physique réelle. Curieuse sensation. Calme apparent, fascination progressive, malaise sous-jacent. Intrigué au départ, je sentais maintenant l'angoisse aux aguets. Et pourtant, je restais calme.

Le filet lumineux était là mais n'évoluait pas, ni en taille, ni en intensité. En revanche, son emprise sur moi croissait lentement et surement. Refluant le cartésianisme, je cédai progressivement à un mal être intérieur indescriptible mais bien présent.

Et pourtant, je restai là, à observer, à tenter de comprendre, à élucider, et surtout, à rationaliser la chose. C'est précisément à ce moment que ce qui m'avait intrigué un bon moment disparut, sapant ma tentative intellectuelle de rendre l'évènement cohérent. Si je fus rassuré sur le coup, je réalisai promptement que l'étrangeté persistait.

Je n'avais pas bougé d'un pouce. Je fixais toujours l'eau, au fond de la cuvette, obscure à cet instant. Cependant, je savais que la lumière s'était déplacée de l'autre côté de cet endroit intime. Je n'avais perçu aucun mouvement, aucun changement, mais j'en avais pleine conscience, elle avait migré dans la pièce qui jouxte les toilettes et avait trouvé refuge sur le mur.

Etant toujours au même endroit, il m'était impossible de la voir mais je la savais existante, installée, quasi omniprésente. L'emprise sur moi devenait plus forte, j'étais envahi. Sourde inquiétude, qui n'épargnait maintenant aucun recoin de ma personne. Je percevais l'étrange, je le vivais corps et âme.

Le trouble s'intensifia lorsque je me retrouvai dans la situation initiale. Toujours debout dans le même lieu, je revivais ce qui m'avait intrigué quelques instant auparavant. Même filet de lumière, même luminescence, même endroit, même forme. Seule différait ma sensation, je me sentais peu à peu possédé.

Le manège recommença. Disparition du phénomène, nouvelle migration, au même endroit. Et puis une fois encore, réitération de la perturbation, Sysiphe angoissant. J'étais paralysé de frayeur, pétri d'épouvante. J'appréhendais maintenant le malin dont l'incarnation était pour le moins ésotérique.

Je n'ai toujours pas compris comment, mais à un moment du cycle infernal, j'ai pu me retrouver dans la pièce adjacente, en face du mur qui accueillait la lumière que je percevais dès lors sans hésiter comme satanique. Le filet avait cédé la place à une sorte d'onde à peine perceptible, qui se mouvait avec lenteur sur le mur, de haut en bas, protéiforme.

Je n'étais plus isolé et pu échanger quelques mots avec ceux qui faisaient le même constat horrifié que moi. Si je me souviens d'avoir parlé, j'ai totalement oublié mes mots tant je me sentais asservi par ce halo pernicieux. Dans une audace extrême, mon voisin avança d'un pas et posa la main sur le mur pour tenter d'effacer la lueur.

Comme elle l'avait fait à maintes reprises, celle-ci s'éteignit au premier contact de la main avec la surface sur laquelle la pâle lumière n'avait cessé de se mouvoir étrangement. Il y eût un temps d'arrêt, à nouveau l'espoir d'une délivrance. Celui-ci retomba vite. Nous étions à présent convaincus, sans mot dire, que la chose nous avait choisi comme hôte, à part égale. Nous étions possédés, sans avoir pu, ni su, résister.

Dans un ultime sursaut, j'allumai la lampe, puis aussitôt le poste de radio et restai immobile un long moment. Il me fallu du temps pour sortir de ce redoutable cauchemar. Et j'avoue que c'est avec le souvenir de la nuit et une certaine appréhension qu'au moment du lever je suis allé dans ce lieu, dit d'aisance, pour soulager ma vessie...

 

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