Les lions se sont-ils... ou non, prosternés aux pieds de Sainte Blandine ?
Vaste controverse.
Je vais ici défendre le point de vue "ou non" à l'aide d'une série de clichés d'époque.
En premier lieu, nous pouvons constater que sur l'ensemble des clichés, les lions sont dans des positions diverses et variées qui n'ont rien à voir avec la prosternation.
En effet, si l'on s'en tient à la définition de se prosterner, on trouve ceci
- "s'incliner jusqu'au sol en signe de profond respect" ou bien
- "S'incliner profondément devant quelqu'un, quelque chose en signe de grand respect, d'adoration, d'humilité" ou encore, au sens littéraire du terme
- "Manifester à quelqu'un une obéissance, un respect serviles" et même
- "Se baisser jusqu'à terre, en signe d'adoration ou en posture de suppliant, se jeter à genoux au pieds de quelqu'un" sans oublier
- "Reconnaître, avouer la supériorité de quelqu’un en quelque genre que ce soit"
Bon ! Voyons maintenant les images une à une.
Cliché n°1, pris à l'entrée de Ste Blandine dans l'arène, alors que le régisseur de la cérémonie n'a même pas encore installé la potence pour y attacher la martyre... Regardez bine les lions. Vous constaterez, comme moi, qu'ils n'ont strictement rien à foutre de Ste Blandine, se demandent pourquoi on les menés là. Ils sont assez proches de la suppliciée uniquement parce qu'elle dégage un peu de cette chaleur qu'affectionnent les grands fauves. Dans tous les cas, pas un n'a l'idée de se prosterner... et d'une !
Cliché n°2, pris après l'installation, par les machinistes, de la potence, mais avant que le régisseur retrouve le fil de cuisine pour attacher Ste Blandine au poteau, comme la dinde à la broche, histoire d'exciter un peu l'appétit des félins. Je reconnais que la posture des animaux a varié en regard du premier cliché, cependant, ne nous y trompons pas... de prosternation il n'y a point ! En vérité, ces pauvres bougres à qui on veut à toute force faire bouffer de la viande bénie se tamponnent le coquillard de la future sainte qui nous fait le coup de la mise en croix, en ayant oublié, la sotte, qu'il n'y a pas de traverse à la potence pour y lier ses bras. Certes les lions sont allongés aux pieds de Ste Blandine mais uniquement parce qu'ils sont là, et pis c'est tout ! Ils n'ont d'ailleurs pas plus envie de se prosterner que de lui lécher les aisselles ! et de deux...
Cliché n°3, pris quand enfin le régisseur a retrouvé la pelote de fil de cuisine et que les machinistes ont en partie réussi à ligoter la dame. Alors... les fauves... prosternés ? Que nenni ! Outre le tigre, qui s'est un tantinet gouré d'histoire, observez les trois lions. Pas un, je dis bien pas un, n'a les genoux plantés en terre en signe d'obéissance ou de respect servile. Y'en a pas un qui la regarde la Blandine. Ils n'en ont rien à péter de cette gigolette. Le seul qui la mate a les yeux fixés sur les genoux de la dame. Tu parle d'un respect ! Quand à celui qui est allongé, que dis-je... vautré ! Il cuve, ça se voit, c'est évident. Il a l'air abruti de celui qui a trop forcé sur la bouteille la veille, en dévorant des petits enfants catholiques grassouillets. Il n'en peut plus et n'a pas du tout envie de s'incliner profondément, se disant que la chose va lui bloquer l'estomac et le faire gerber. Qui plus est, comme la belle a enfin compris qu'elle ne pourra être crucifiée, par manque de traverse, elle bat des bras et génère un petit courant d'air qui ne va pas sans agacer les rois de la savane. Et de trois.
Cliché n°4, pris juste après le départ des fauves excédés par les battements de mains de Ste Blandine. Seul un fauve figure sur l'instantané car les autres se sont fait la malle sans demander leur reste, en jurant bien que la prosternation, ce serait pas pour ce jour là. Le photographe rapporte que le dernier lion a été chargé par tous les autres de trouver de quoi calmer l'agitée. et de quatre.
cliché n°5, pris juste après l'intervention du régisseur qui a retrouvé la pelote de fil et l'a confiée aux machistes afin que ces derniers entravent les mains de Ste Blandine ; cela moins dans l'esprit de torturer la jeune fille que d'apaiser les lions. En effet, les lions étant réutilisables lors de prochains sacrifices, il est judicieux de les conserver en bonne forme alors qu'un peu plus, un peu moins pour les martyrs, on s'en moque un peu. Cela dit, je vous ferai observer que même à ce stade, les lions n'ont, s'ils ont daigné revenir, toujours pas en tête de se prosterner. Le premier somnole, perdu dans ses pensées sur la critique de la raison pure, qu'il a eu du mal de finir, tandis que le second ne comprend toujours pas pourquoi on attache les suppliciés au poteau plutôt que de les empaler de suite, façon brochette aux abats...
Quant à reconnaitre la supériorité de Ste Blandine, pouvez-vous imaginer une fraction de seconde qu'un lion, roi des animaux, puisse se plier à cela ? Moi-même, j'aurais déjà du mal, alors un lion !?! On rêve tout debout. Et de cinq !
Voilà, j'arrive au terme de ma démonstration et si dans la controverse, d'aucun réussit à me convaincre que l'attitude des lions envers Ste Blandine est pleine de profond respect, d'adoration et d'humilité, je le jure, je me prosterne devant lui/elle !